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Fête de Saint Castrese

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SAN CASTRESE

 
Au village au mois de mai, il y avait la fête du Saint Patron. Cela durait trois jours, une fête religieuse qui donnait droit à plusieurs manifestations culturelles et amusantes. La route principale qui traversait le village était décorée d’illuminations en forme d’arcs. Enfant, j’adorais cette ambiance féérique. Ce que m’attirait le plus était le kiosque sur la place principale qui accueillait les musiciens, seul moment où j’accédais à la culture musicale. Parfois même, je retenais ma respiration pour ne pas riquer de manquer une seule note!

La seule musique de ma connaissance était d’abord les chants des oiseaux. Le dimanche, on sortait le Saint, porté par plusieurs personnes musclées car il fallait traverser tout le village en une foule en procession, qui suivait en priant et en chantant pendant plusieurs kilomètres, en faisant de temps en temps une pause qui se devait, et je voyais ces hommes transpirer sous le poids de la statue du Saint Castrese. Au passage du Saint les fenêtres s’ouvraient, et une pluie de pétales des roses multicolores tombait alors sur la foule. Ce culte enraciné dans l’âme populaire depuis des millénaires, permettait aux fidèles de rendre supportable la maladie, la misère, la dureté de la vie.

La foule était représentée par les pèlerins en quête de pardon. Au cours du rassemblement, naît ainsi une puissance vibratoire, d’où émanent des forces qui dépassent l’entendement, de ceux qui doutent. De cette procession j’ai conservé les odeurs, sous le soleil brûlant de fin mai. Les cierges brûlaient et cette ambiance de ferveur, cette énergie qui cimente toute une communauté m’a toujours laissée perplexe. Quand la procession était terminée, on déposait le Saint dans l’église, et le feu d’artifice terminait ce rituel. Enfin, vers deux heures de l’après-midi, chacun regagnait sa maison et un repas plus riche qu'à l’habitude venait immortaliser la tradition villageoise. Ce qui a enrichi et ravi le plus mes souvenirs épicuriens, comme mes papilles! En me laissant un goût tout en douceur, était l’énorme gâteau, haut de dix centimètres farci de crème à la vanille, au citron et au chocolat. Ce gâteau cuit au four à bois, élaboré depuis plusieurs générations et qui n'existe que dans la tradition familiale (son goût ne m’a jamais quitté), était confectionné une fois dans l’année. J’ai essayé de le faire, mais la réussite reste médiocre.

J’aimais tellement cette fête que j’aurais tout donné pour ne pas la rater.

Quand j’avais dix ans, mon père, qui avait  toujours porté le travail aux nues -toute oisiveté étant à bannir d’après lui-, avait décidé de nous faire travailler le dimanche de la fête, car il fallait  arracher les pois chiches pour la réserve hivernale. Mes soeurs, mon frère et moi avions protesté, et ma mère comme à son habitude, ne voulant pas contrarier son mari, s'en remit à mon père.  Aucun de nous ne voulant manquer la fête, malgré la crainte d'affronter le diktat de mon père, et, après nous être consultés, nous avons proposé un compromis à l'ordre que mon père nous avait donné. On allait donc travailler à partir de cinq heures du matin jusqu’à dix heures et ensuite nous irions récupérer notre liberté pour partir nous amuser comme tous les villageois. Comme nous étions plus nombreux, mon père accepta de faire ce compromis.

Le lendemain tout le monde debout et comme promis, à dix heures le travail terminé nous nous apprêtames à quitter les champs, mais surprise, la décision consensuelle venait d’être mise en cause: mon père venait de changer d' avis et nous ordonna de nous rendre dans un autre champ pour arracher le reste des pois chiches. Mon père et son comportement versatile. Personne ne s'y opposa. J'étais pour ma part envahie par une immense indignation toute puissante d’une parole non respectée, et je pris la décision… de laisser là, le labeur, et partis carrément sur le chemin de la maison en me moquant éperdument des menaces de mon père. J’avançais d’un bon pas léger, comme une plume, ne pensant qu’au plaisir de rejoindre la foule joyeuse qui célébrait San Castrese. Mais mon père, me voyant disparaître de son horizon... avec toute la force de sa haine d’avoir  été contrarié, prit un caillou…et le lança dans ma direction. Le caillou arriva avec une vitesse d’obus et me heurta derrière la tête. La violence de mon père venait encore de me frapper. Je mis ma main derrière ma tête et sentis un liquide chaud et rouge couler… puis ce fut le noir complet.

Je perdis connaissance. Je ne repris conscience que le lendemain, grâce aux bons soins de ma grand-mère qui avait également fait venir le médecin. Elle m’enjoignit de déclarer que je m’étais blessée seule en voulant faire tomber un fruit de l’arbre. Mais je refusais obstinément de défendre le comportement violent de mon père. Ma grande mère plaida sa cause et me promit que s’il venait à me toucher à nouveau, il aurait à faire à elle. Ma cicatrice est encore visible, comme une marque de famille.

 
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Date de création : 18/03/2016 @ 16:28
Dernière modification : 26/04/2020 @ 18:09
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